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30,84105/06/2001

Mon père a -t- il le droit de prendre ce qu’il veut de mes biens ?

Question: 9594

Mon père cite le hadith :   Toi et tes biens appartenez à ton père  ou   la propriété du fils est une propriété du père  Est- ce exact ? Cela veut-il dire que le père a le droit de prendre ce qu’il veut des biens de son fils malgré la volonté de celui-ci ? Je sais que les enfants doivent prendre soin de leur père.

Texte de la réponse

Louanges à Allah et paix et bénédictions sur le Messager d'Allah et sa famille.

1. Le hadith :   D’après Djabir, un homme dit : ô Messager d’Allah,  je possède des biens et des enfants, mais mon père veut s’emparer de mes biens. .

Le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) lui dit :   Toi et tes biens appartenez à ton père  (rapporté par Ibn Madia, 2291 et Ibn Hibban dans son Sahih, 2/142 d’après le hadith de Djabir et (2292) et Ahmad, 6902 d’après un hadith d’Abd Allah Ibn Amr.

La version d’Ahmad est rapportée d’après Amr ibn Shouayb d’après son père qui le tenait de son grand-père qui a dit qu’un bédouin s’était adressé au Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui) et lui avait dit : Mon père veut s’emparer de mes biens . Le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) lui dit :   Tes biens et toi-même appartiennent à ton père – Les biens les plus licites  dont vous puissiez vous nourrir sont ceux acquis par vous-mêmes. Or c’est le cas des biens de vos enfants ; mangez-en donc en toute tranquillité.  Ce hadith est rapporté par plusieurs voies et est corroboré par des versions qui l’authentifient. Voir Fateh al-Bari, 5/211) et Nasb ar-Raya, 3/337).

2. La lettre  laam  figurant dans le hadith ne signifie pas ‘propriété’ mais ‘autorisation’. A ce propos, Ibn al-Qayyim dit : «  La lettre  laam  figurant dans le hadith ne signifie absolument pas la propriété … Celui qui dit qu’elle signifie ‘ autorisation’  fait une plus heureuse interprétation du hadith, sans laquelle, il serait sans utilité et sans signification. Ilaam al-mouwaqqin, 1/116.

3. Parmi les facteurs qui indiquent la lettre  laam  ne signifie pas la propriété le fait que les biens du fils sont reçus en succession par ses enfants, sa mère et son épouse. Or si les biens appartenaient réellement au père, celui-ci serait le seul à en disposer.

Ash-Shafii a dit :  … parce que cela n’est pas établi. En effet, Allah a donné au père une part de la succession de son fils et l’a considéré comme un héritier parmi d’autres dont la part peut parfois être inférieure à celle de bon nombre d’autres héritiers. Ce qui indique que les biens sont la propriété de son fils et pas la sienne.  Voir ar-Rissala, P. 468.

4. L’autorisation faite au père n’est pas absolue puisqu’elle est assortie de 4 conditions. Ibn Outhaymine (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit : «  Ce hadith n’est pas faible en raison de l’existence d’autres versions qui le corroborent. Il signifie que le père peut utiliser sans difficulté les biens de son fils fortuné et peut en prendre ce qu’il veut, pourvu de respecter une ou plutôt des conditions, à savoir :

La première condition consiste dans l’absence de préjudices pour le fils. Si la prise d’un bien entraîne un préjudice, elle devient interdite. C’est comme s’il s’emparait de la couverture dont le fils se couvre pour se protéger contre le froid ou confisquait sa nourriture dont il a besoin.

La deuxième condition est que le bien convoité par le père ne fasse pas l’objet d’un besoin du fils. Si par exemple, celui-ci avait une esclave qu’il utilise à titre de concubine, il ne serait pas permis au père de la prendre puisque le fils en a besoin. Il en est de même si le fils possède un véhicule dont il a besoin pour ses déplacements et n’a pas assez d’argent pour pouvoir se procurer un autre ; le père ne pourrait en aucun cas s’en emparer.

La troisième condition est de ne pas prendre le bien d’un fils pour le donner à un autre fils, car agir ainsi reviendrait à créer une inimitié entre les enfants à cause de la préférence des uns aux autres, à moins que le fils bénéficiaire ne soit un nécessiteux. Si tel est le cas, le fait de lui donner à l’exclusion des autres ne constitue pas un acte de discrimination, amis une obligation.

En tout cas, ce hadith est un argument adopté et utilisé par les ulémas. Mais son application est assortie des conditions que nous avons mentionnées. En effet, le père n’a pas le droit de prendre le bien de l’un de ses fils pour le donner à un autre. Allah le Très Haut le sait mieux. Fatawa islamiyya, 4/108,109.

Il existe une quatrième condition qui est très importante, à savoir que le père doit éprouver un besoin réel du bien qu’il prend à son enfant. Cette condition a été clairement mentionnée dans certains hadith. A ce propos Aïcha (P.A.a) a dit : «  Le Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui) a dit :   Les enfants sont un présent qu’Allah vous a fait  Il offre des femelles à qui Il veut et des mâles à qui Il veut ». Leurs biens et eux-mêmes vous appartiennent en cas de besoin. » (rapporté par al-Hakim, 2/284 et al-Bayhaqi, 7/480).

Le hadith est déclaré authentique par Cheikh al-Albani dans as-Silsila as-Sahiha, 2564 où il dit : « Ce hadith comporte une leçon juridique très importante dans la mesure où il explique que le célèbre hadith qui dit :  Tes biens et toi-même appartiennent à ton père  (Irwa, 838) n’est pas à prendre au sens absolu de sorte que le père peut prendre des biens de son enfant ce qu’il voudrait. Pas du tout, il ne peut en prendre que dans les limites du besoin. Allah le sait mieux.

Source

Sheikh Muhammed Salih Al-Munajjid

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